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Non-respect des règles parasismiques et garantie décennale

Civil - Immobilier
Affaires - Assurance
25/09/2019
Des travaux de nature parasismique apportant d’importantes modifications de structures des bâtiments existants sont de nature à engager la responsabilité décennale de leur auteur, du fait du non-respect des règles parasismiques en vigueur au moment du dépôt du permis de construire.
Une SCI a transformé une ferme en appartements locatifs, et confié le lot terrassement, maçonnerie, béton armé d’une part, et le lot charpente, couverture, d’autre part, à deux sociétés. Se plaignant de la non-conformité de l’immeuble rénové aux normes parasismiques, la SCI a, après expertise, assigné ces deux sociétés en indemnisation ainsi que leurs assureurs respectifs.
 
Ces derniers contestent, devant la Cour de cassation, l’arrêt rendu par la cour d’appel selon lequel « compte tenu de la date de délivrance du permis de construire, les normes parasismiques applicables au chantier litigieux étaient prévues par le décret n° 91-461 du 17 mai 1991 et l’arrêté du 29 mai 1997 pris pour son application, (…) qu’il résultait de la combinaison de ces textes que ces normes parasismiques s’appliquaient d’une manière générale "aux modifications importantes des structures des bâtiments existants", de sorte que les travaux de rénovation réalisés (…), qui impliquaient précisément de telles modifications, étaient soumis à ces normes parasismiques, ce dont la cour d’appel a déduit l’existence d’un désordre décennal résultant de la non-conformité des travaux entrepris (…) aux normes parasismiques applicables et l’atteinte subséquente à la solidité de l’ouvrage ». En effet, il est notamment reproché à l’arrêt de ne pas préciser « à quels travaux énumérés par l’arrêté du 29 mai 1997 correspondraient les modifications "importantes" ».

La Haute juridiction rejette le pourvoi aux motifs que « ayant relevé que le décret du 14 mai 1991, modifié par celui du 13 septembre 2000 rendait les normes parasismiques applicables aux modifications importantes des structures des bâtiments existants et constaté que les travaux réalisés par la SCI avaient apporté de telles modifications, la cour d’appel, qui en a exactement déduit que ces normes devaient s’appliquer, a légalement justifié sa décision ».

Cet arrêt rappelle une règle affirmée dès 2010 par la Cour de cassation : le non-respect des règles parasismiques peut être retenu comme un désordre de nature décennale, dès lors que lesdites règles étaient applicables au moment du dépôt du permis de construire (Cass. 3e civ., 1er déc. 2010, n° 09-15.282).

La question du non-respect des règles parasismiques induisant l’application de la garantie décennale est une question importante.

La jurisprudence avait estimé que, pour engager la responsabilité décennale d’un constructeur, il convenait au préalable de démontrer que la non-conformité aux normes parasismiques devait porter sur des éléments essentiels de la construction et présenter un risque de destruction de l’ouvrage en cas de séisme (Cass. 3e civ., 25 mai 2005, n° 03-20.247 ; Cass. 3e civ., 7 oct.2009, n° 08-17.620).

Dans le sens d’une interprétation extensive, il avait même été admis que « la non-conformité d’un ouvrage aux règles parasismiques dans une région soumise à un risque de séisme avait nécessairement vocation à porter atteinte à sa solidité » (Cass. 3e civ., 11 mai 2011, n° 10-11.713).

Cependant, la Cour de cassation semble être revenue à une conception plus stricte dans un arrêt rendu le 5 juillet 2018 (Cass. 3e civ., 5 juill. 2018, nos 17-17.902, 17-19.348 et 17-19.513) : « Mais attendu que, n'ayant pas retenu que le défaut de conformité d'une partie des fondations aux normes parasismiques était de nature à compromettre la solidité de la maison ni à la rendre impropre à sa destination mais seulement à entraîner un risque de perte dont elle n'a pas déterminé l'étendue, la cour d'appel a justement déduit de ces appréciations souveraines que ce défaut de conformité engageait la responsabilité contractuelle du constructeur ».
Source : Actualités du droit