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Entrée et séjour du citoyen non ressortissant de l’UE dans l’État membre de son partenaire

Civil - Personnes et famille/patrimoine
22/08/2018
Dans un arrêt du 12 juillet 2018, la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) affirme que lorsqu’un citoyen de l’Union retourne dans son État membre d’origine, ce dernier est tenu de favoriser l’entrée et le séjour du partenaire non ressortissant de l'Union avec lequel ce citoyen a une relation durable.
En l’espèce, un ressortissant britannique et sa partenaire sud-africaine ont décidé, après avoir vécu en Afrique du Sud puis aux Pays-Bas, de s’installer au Royaume-Uni. La carte de séjour sollicitée par la partenaire du ressortissant britannique lui a été refusée, au motif que les deux conjoints n’étaient pas mariés au moment de l’introduction de la demande du titre.

Cette décision a été prise en application de la législation britannique (transposant la directive 2004/38/CE) qui détermine les droits des membres de la famille des ressortissants britanniques retournant au Royaume-Uni après avoir exercé leur droit de libre circulation dans un autre État membre. Selon cette législation, afin d’être considéré comme membre de la famille d’un citoyen britannique, le demandeur doit être « le conjoint ou le partenaire enregistré d’un ressortissant du Royaume-Uni ». La demande de titre de séjour a donc été rejetée au motif que la ressortissante sud-africaine était « la partenaire non mariée » du ressortissant britannique.

Question préjudicielle

La juridiction britannique en charge de l’affaire décide de poser une question préjudicielle à la Cour de justice, afin de clarifier l’interprétation à donner à la directive 2004/38/CE relative au droit des citoyens de l’Union et des membres de leurs familles de circuler et de séjourner librement sur le territoire des États membres. Il est demandé à la cour si cette directive impose de délivrer ou favoriser l’octroi d’un titre de séjour au partenaire non marié d’un ressortissant de l’Union européenne qui retourne dans son État d'origine.

La juridiction britannique demande également à la CJUE de préciser si une décision de refus « qui n’est pas fondée sur un examen approfondi de la situation personnelle du demandeur et qui n’est pas motivée de manière adéquate ou suffisante » enfreint la directive 2004/38/CE.

Obligation de favoriser l’entrée et le séjour du partenaire

La Cour de justice rappelle tout d’abord que la directive invoquée impose aux États membres de favoriser l’entrée et le séjour du partenaire d’un ressortissant de l’Union qui se rend dans un État membre autre que celui dont il a la nationalité. Elle ne concerne donc pas le cas du retour d’un ressortissant de l’Union dans son État d’origine. Elle relève cependant qu’il ressort de sa jurisprudence que certains ressortissants d’États tiers, membres de la famille d’un citoyen de l’Union, ont pu bénéficier d’un droit de séjour dérivé dans l’État membre dont ce citoyen possède la nationalité, sur le fondement de l’article 21, paragraphe 1, du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE) (CJUE, 5 juin 2018, aff. C-673/16, Coman e.a. c/ Inspectoratul General pentru Imigrari, point 23).

Selon la cour, « cette jurisprudence est également valable s’agissant du partenaire avec lequel le citoyen de l’Union a une relation durable, dûment attestée », au sens de l’article 3, paragraphe 2, alinéa 1er, b) de la directive. Ainsi, bien que cette dernière ne concerne pas directement l’hypothèse du retour du citoyen dans son État membre d’origine, la jurisprudence évoquée précédemment doit s’appliquer par analogie à ce cas (CJUE, 12 mars 2014, aff. C-456/12, O. et B., points 50 et 61, et aff. C-673/16 précitée, point 25).

Délimitation de l’obligation

La CJUE juge ainsi qu’il découle de l’article 21 paragraphe 1 du TFUE que, lorsqu’un citoyen de l’Union retourne dans son État membre d’origine, ce dernier est tenu de favoriser l’entrée et le séjour du partenaire non ressortissant de l'Union avec lequel ce citoyen a une relation durable.

Elle ajoute toutefois qu'il ressort de sa jurisprudence que cette disposition n’oblige pas les États membres à « reconnaître un droit d’entrée et de séjour en faveur des ressortissants d’États tiers visés à cette disposition », mais seulement à favoriser les demandes de ces partenaires non ressortissants de l’Union par rapport à celles d’autres ressortissants d’États tiers (CJUE, 5 sept. 2012, aff. C-83/11, Rahman e.a., point 21).

Précisions

La cour précise également qu’une décision refusant d’accorder une telle autorisation de séjour au partenaire non ressortissant de l’Union européenne doit être fondée sur un examen approfondi de la situation personnelle du demandeur et doit être motivée.

Enfin, la Cour de justice rappelle que les ressortissants hors Union européenne dont la demande de titre de séjour a été refusée doivent disposer d’une voie de recours leur permettant de contester cette décision de refus. Dans ce cadre, il revient au juge national de vérifier que ladite décision repose effectivement « sur une base factuelle suffisamment solide », ainsi que le respect des garanties procédurales.
Source : Actualités du droit