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Fonction publique : attribution de titres-restaurant aux télétravailleurs

Public - Droit public général
20/07/2022
Dans un arrêt rendu le 7 juillet 2022, le Conseil d’État a annoncé que les administrations publiques ayant mis en place des titres-restaurant devaient les distribuer à leurs agents non seulement pour les jours de travail dans les locaux de l’employeur mais également pour les jours de télétravail.
L’attribution de titres-restaurant aux télétravailleurs a fait l’objet de débats à l’occasion de la pandémie de Covid-19 et a donné lieu à des positions divergentes de la part des tribunaux judiciaires. Face à ces questionnements, le ministère du travail a finalement indiqué dans un questions – réponses que les télétravailleurs devaient également se voir attribuer des titres-restaurant.
 
En ce qui concerne les agents publics, c’est par une décision rendue le 7 juillet 2022 (CE, 7 juill. 2022, n° 457140, Lebon T.) que le Conseil d’État a tranché, déclarant que les agents télétravailleurs bénéficiant de titres-restaurant sur leur lieu de travail devaient également en bénéficier durant leurs jours de télétravail.
 
Mêmes droits et obligations
 
Le Conseil rappelle dans son arrêt que l'article 6 du décret du 11 février 2016 relatif aux conditions et modalités de mise en œuvre du télétravail dans la fonction publique et la magistrature dispose que : « Les agents exerçant leurs fonctions en télétravail bénéficient des mêmes droits et obligations que les agents exerçant sur leur lieu d'affectation. / L'employeur prend en charge les coûts découlant directement de l'exercice des fonctions en télétravail, notamment le coût des matériels, logiciels, abonnements, communications et outils ainsi que de la maintenance de ceux-ci [...] ».
 
Par ailleurs, l’article 19 de l'ordonnance du 27 septembre 1967 relative à l'aménagement des conditions de travail en ce qui concerne le régime des conventions collectives, le travail des jeunes et les titres-restaurant prévoit deux cas d’attribution de titres-restaurant :
  • absence de dispositif de restauration collective ;
  • présence d’un dispositif de restauration collective mais poste de travail trop éloigné.
 
Le Conseil déclare qu’il résulte des dispositions du décret du 11 février 2016 que « lorsqu'une administration décide d'attribuer le titre-restaurant à ses agents […], les agents exerçant leurs fonctions en télétravail bénéficient du même droit à l'attribution de ce titre que s'ils exerçaient leurs fonctions sur leur lieu d'affectation ».
 
Principe d’égalité de traitement
 
Le bénéfice de titres-restaurant est donc le même que les fonctions soient exercées en télétravail ou dans les locaux de l’employeur. La Haute cour prend ici le contrepied du rapporteur public M. Arnaud Skzryerbak, qui estimait dans ses conclusions « que les fonctionnaires qui télétravaillent ne peuvent prétendre aux titres-restaurant ». Il considérait que l’exclusion des télétravailleurs du bénéfice des titres-restaurant « ne méconna(issait) pas le principe  d’égalité de traitement fixé par les textes dès lors que ce principe ne s’applique qu’à  conditions équivalentes et que celles des télétravailleurs et des travailleurs sur site ne le sont  pas au regard de l’objet de ces titres ».
 
Le Conseil souligne tout de même que ce droit est réservé aux agents bénéficiant déjà des titres-restaurant sur le lieu d’affectation. Or, dans l’affaire soumise au Conseil, l’agent bénéficiait d’un dispositif de restauration collective, ce qui excluait l’attribution de titres-restaurant. Par conséquent, l’agent ne pouvait prétendre percevoir ces titres lors de ses jours de télétravail.
 
Position du juge judiciaire sur l’attribution de titres-restaurant aux télétravailleurs
 
Le Tribunal judiciaire de Nanterre avait répondu à la question à la question de l'attribution de ces titres aux télétravailleurs par la négative en mars 2021 en déclarant : « l’objectif poursuivi par l’employeur en finançant ces titres de paiement en tout ou en partie, est de permettre à ses salariés de faire face au surcoût lié à la restauration hors de leur domicile pour ceux qui seraient dans l’impossibilité de prendre leur repas à leur domicile ». Il estimait que « les salariés de l’UES, placés en télétravail, le sont à leur domicile et ne peuvent donc prétendre, en l’absence de surcoût lié à leur restauration hors de leur domicile, à l’attribution de tickets-restaurant ». (TJ Nanterre, 10 mars 2021, n° RG 20/09616, voir Les télétravailleurs peuvent être exclus du bénéfice des titres-restaurant, selon le TJ de Nanterre).
 
Le Tribunal judiciaire de Paris avait, quelques semaines plus tard, jugé l’inverse, considérant que « l’objet du titre-restaurant est de permettre au salarié de se restaurer lorsqu’il accomplit son horaire de travail journalier comprenant un repas, mais non sous condition qu’il ne dispose pas d’un espace personnel pour le préparer » (TJ Paris, 30 mars 2021, Répertoire général nº 20/09805, voir Titres-restaurant : le TJ de Paris exige l’égalité de traitement entre télétravailleurs et salariés sur site).
 
Source : Actualités du droit