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Vente en ligne de billets par un intermédiaire pour un événement culturel ou sportif : la rétractation est-elle possible ?

Civil - Contrat
06/04/2022
À l’occasion de la vente à distance de billets pour un évènement culturel ou sportif, l’intermédiaire ayant agi en son nom mais pour le compte de l’organisateur de l’évènement peut, comme l’organisateur, opposer au consommateur l’exception au droit de rétractation.
Un litige oppose un fournisseur de services de billetterie (une plateforme de réservation en ligne), au sujet de l’existence d’un droit de rétractation concernant un contrat portant sur l’acquisition de billets d’entrée pour un concert. En raison des restrictions administratives adoptées par les autorités allemandes dans le contexte de la pandémie de Covid-19, ce concert est annulé et possiblement reporté à une date ultérieure. L’acheteur des billets en demande le remboursement ; il déclare donc implicitement se rétracter de son contrat conclu avec l’intermédiaire. Conformément à la réglementation allemande, l’intermédiaire, agissant pour le compte de l’organisateur du concert, fait parvenir à l’acheteur un bon à valoir émis par cet organisateur, correspondant au prix d’achat des billets. L’acheteur saisit le juge afin de faire reconnaître sa rétractation et obtenir le remboursement des billets. L’intermédiaire invoque l’exception au droit de rétractation prévue par l’article 16, sous l), de la directive 2011/83 du Parlement européen et du Conseil, du 25 octobre 2011, relative aux droits des consommateurs.
 
Pour résumer la procédure, le juge allemand considère d’abord que l’exception au droit de rétractation ne s’applique pas ici, estimant que celle-ci ne bénéficie qu’au prestataire direct, à savoir à l’organisateur du concert, et non au fournisseur de services de billetterie dont l’activité se limite à la cession d’un droit d’accès à ce concert. Il ajoute que, à la suite d’une rétractation survenue dans un délai de plusieurs mois avant la date prévue pour cette activité, le professionnel a la possibilité d’exploiter autrement les capacités réservées, en revendant les billets concernés à d’autres personnes. Puis le tribunal décide de surseoir à statuer et de poser à la Cour la question préjudicielle suivante : « L’article 16, sous l), de la directive [2011/83] doit-il être interprété en ce sens que, lorsque le professionnel ne fournit pas directement au consommateur un service lié à des activités de loisirs, mais vend au consommateur un droit d’accès à un tel service, cela constitue un motif suffisant pour exclure le droit de rétractation du consommateur ? »
 
Pour la CJUE, dans la mesure où le risque lié à la réservation des capacités libérées pèse sur l’organisateur de l’activité concernée, la cession d’un droit d’accès à celle-ci par un intermédiaire peut constituer un service lié à cette activité. Le point de savoir si, à la date à laquelle le consommateur se prévaut de son droit de rétractation, il serait possible pour le professionnel de remplir autrement les capacités qui seraient libérées en raison de l’exercice de ce droit, notamment au moyen de la revente des billets concernés à d’autres clients, est indifférent.
 
Sa réponse est donc la suivante : L’exception au droit de rétractation prévue par l’article 16 de la directive 2011/83/UE du Parlement européen et du Conseil, du 25  octobre 2011, relative aux droits des consommateurs « est opposable à un consommateur qui a conclu, avec un intermédiaire agissant en son nom, mais pour le compte de l’organisateur d’une activité de loisirs, un contrat à distance portant sur l’acquisition d’un droit d’accès à cette activité, pour autant que, d’une part, l’extinction par voie de rétractation, conformément à l’article 12, sous a), de cette directive, de l’obligation d’exécuter ce contrat à l’égard du consommateur ferait peser le risque lié à la réservation des capacités ainsi libérées sur l’organisateur de l’activité concernée et, d’autre part, l’activité de loisirs à laquelle ce droit donne accès est prévue comme devant se dérouler à une date ou à une période spécifique. »
 
La CJUE confirme ici sa volonté de protéger l’organisateur d’évènements culturels ou sportifs.
Source : Actualités du droit